dimanche 22 mars 2009

La piste d'audace

Hey, sexy.
Je t'imagine, les ongles à moitié rongés à cause de l'implacable tension du suspens que j'ai, il faut le dire, admirablement bien distillé au cours des deux précédents articles, anxieux et frétillant à l'idée, qu'enfin, tu vas savoir comment ça "se" finit. Et t'aimerais bien que je me grouille de finir cette introduction dont tu te bats les meules avec un didgeridoo, déviant que tu es. D'ailleurs je ne vais pas prolonger ton attente, tu serais capable de zapper directement au contenu.

Le récit de la troisième journée, je te le torche vite fait, vu sa courtesse.. sa courteté.. sa courture.. il était pas long. A 7h00 nous commençâmes cash paf par la fameuse piste d'audace,
chronométrée (et vous n'aurez pas MON temps, je tiens à garder le peu de crédibilité qu'il me
reste), au cours de laquelle orage au désespoir, ô épaule droite ennemie, n'ais-je donc tant vécu que pour cette infamie connasse, et hop repos en chambre.

Bref, à la place de m'étaler sur ma peine, mon désarroi, je vous offre cette présentation de la piste. A savoir que sur chaque obstacle haut, on est assuré, il n'y a pas vraiment de "risques".

Obstacle 1 :
Très simple, on part de 1 et on monte l'espèce d'échelle inclinée, puis on se place sur le câble
en 2.


Difficulté : 1 // Vertige : 0,5

Obstacle 2 :
Tyrolienne d'environ 10m, partant de 1. Arrivé à 2 on monte sur la plate-forme. Simple de principe, mais ça tire sur les bras et ça prouve que l'épiderme, même légèrement protégé par du tissu, n'est pas de taille face à de l'acier trempé.


Difficulté : 3 // Vertige : 0,75 // Alex perd l'équilibre et fait le cochon pendu : 2


Obstacle 3 :
Cet obstacle est, comme tous d'ailleurs, très con en soi. Il suffit de marcher le long de la flèche,
soit 4m au total. Sans se tenir bien sûr.

Difficulté : 0,5 // Vertige : 250 000 // Alex craque et se laisse tomber comme une merde
contre le tapis de la paroi : NON (mais pas loin)

Obstacle 4 :
On grimpe l'échelle pour l'étage juste au-dessus. Encore une tyrolienne sur 15m, mais double. On se cale à quatre pattes, les genoux vers l'extérieur pour être stable (LOL MDR AHAHAHA), et on avance, se déchiquettant au passage d'autres lambeaux de peau épargnés par la première tyrolienne.


Difficulté : 4 // Vertige : 4 // Mais putain qu'est-ce que je fous là, à quoi ça va me servir je suis
tankiste j'en ai rien à branler de leur merde ("fracture du moral") : en progression.

Obstacle 5 :
En plein forme (les copains) ou tout essoufflé (moi), on s'allonge sur la potence en 1, puis on attrappe la corde et on fait un truc stupide (je veux dire, plus que la piste en elle-même) : on s'enroule autour de la potence en se laissant tomber. Ensuite, on descend la corde.


Difficulté : 2 // Vertige : 4 // Non, même en cherchant, je vois rien de marrant à rajouter : 1

Obstacle 6&7 :
On court jusqu'au départ et on grimpe sur deux rails (1 et 2), les pieds dans la rainure intérieure,
puis on joue à mario pour revenir en bas.

Difficulté : 1 // Vertige : Non Observé // Illusion de facilité : 12

Obstacle 8&9 :
Cette fois-ci on regrimpe par les deux autres rails (3 et 4), les pieds dans la rainure extérieure. Une fois sur la plate-forme, on ramène la corde à soi, on s'attache, on s'agrippe, on pense à maman et on se lance. A proximité du filet, on tend un bras en avant pour s'agripper violemment.


Difficulté : 4 // Vertige : Non Observé // Vitesse : 240 km/h // Alex se prend pour Tarzan : faible
BONUS : Alex se prend pour Spiderman : faible
BONUS 2 : Alex rate le filet et se balance lamentablement pendant 2 minutes : +3
BONUS 3 : Alex rattrape le filet d'une main et s'explose l'épaule quand la corde et son corps le tirent en arrière : +1000

Obstacle 10 :
La fameuse gouttière. C'est pas compliqué, on met ses mains derrière la gouttière, ses pieds contre le mur, et on monte.


Difficulté : 8 (personne normale), 170 (déficience génétique de la coordination des membres, polio, moi) // Vertige : Aucune Idée // Alex fait plus d'un mètre : Non Observé

Obstacle 11 :
Tyrolienne double, variante. La photo parle d'elle-même. Debout sur le câble du bas, celui du haut sur la nuque, les yeux rivés vers la ligne bleue des Vosges et on avance en crâbe.


Difficulté : 2 // Vertige : 0,5 (je regarde en face) 50 (je regarde en bas)

obstacle 12 :
On grimpe d'un étage. On respire très fort et on saute contre la gouttière en fermant les yeux et on s'agrippe comme si demain n'existait pas. On ne les ouvre que quand l'instructeur nous rappelle gentiment qu'il va falloir descendre, maintenant. Après une phase de dé-tétanisation des muscles, on descend (un peu comme les pompiers, mais moins dynamique parce que j'ai peu...PAS PEUR NON MONSIEUR, bouhhouhou).


Difficulté : 0,7 (savoir sauter) // Vertige : over 9000 // Fracture du moral : élargie comme un anus de collègienne dans le quartier haute sécurité de Fleuri Mérogis

A présent, une minute de silence avant l'explication de l'obstacle qui suit. C'est le dernier (les trois qui suivent ne présentent aucun intérêt, et à part le tout dernier, sont franchement pipi-caca. Ahah, j'ai dis caca) que vous allez voir, et à la fois le plus dur et le plus facile.
Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs, Personnes en attente de changement de sexe, voici le "toggle rope".

Obstacle 13 :
Arrivé tout en bas de la gouttière numbeur tou, on se retape l'échelle jusqu'au sommet de la Tour (1) après avoir récupéré La Poignée. On s'assure au câble, on passe la poignée dedans, on s'accroche à la poignée. C'est ensuite que ça se complique sérieusement. Il faut faire un pas en avant. Oui, juste ça, un putain de pas en avant. Après, y'a des conneries à propos d'accélération gravitationnelle, chute des corps, principe d'Archimerde et tout qui jouent, mais on est pas concerné (ou plutôt, on donne pas notre avis). En vue des graviers, on pédale dans le vide pour amortir l'arrivée. Ou, comme moi, on met les pieds en avant, raclant le sol et perdant 3 cm au passage.


Difficulté : 0 (un pas en avant) // Difficulté morale : 2 googol (un pas en avant) // Vertige : j'ai envoyé les données à la Nasa, j'attend les résultats d'une année à l'autre. // Mach 2 atteint après : 6m.

Vala, suite à quoi, on passe un pauvre "pont" qui se balance trèèèès légèrement d'avant en arrière (deux mètres), on passe dans une buse (15 m en "Z") et on finit par un vieux truc contre un mur que je suis aussi incapable d'expliquer que de franchir et on fonce jusqu'au départ.
Fin.
Fin, et, dans mon cas, on s'aperçoit, alors que les muscles se refroidissent et que le souffle s'apaise, de l'impossibilité de lever son bras à plus de 45°.

Commencèrent alors deux semaines de vacances bien méritées. Bien sûr, pour le reste du peloton, amputé de son comic relief, c'était loin d'être fini. Mais ceci est une autre histoire, et là, démerdez-vous : D !

dimanche 15 mars 2009

Oh lawd, iz dat sum delay ?

Yes, yes it is.
Suite à un enchaînement de péripéties diverses et variées, la direction et moi-même avons le regret, la douleur et la honte de vous informer que contrairement aux prévisions, la suite de votre programme favori ne pourra être retransmise aujourd'hui, et venez pas chialer.

Pour vous consoler, une photo de moi au boulot :
http://intrepid.acenet-inc.net/~lekoursk/photos/2009/dodo.jpg

Ceci expliquant cela.

vendredi 6 mars 2009

Fluctuat nec mergitur mais c'était pas loin (2)

Hey.
Malgré un emploi du temps surchargé, je suis parvenu à trouver les deux heures nécessaires à la rédaction de ce qui suit, et je vous en saurai gré de m'en savoir gré, comme on dit quand on fait carrière. Ah, Ah.
Non je ne suis pas ironique, vous pensez vraiment que c'est facile, d'être en base arrière, exempt, quand tout le monde fait trempette dans la boue à 300 bornes ? Héhohé des fois j'oublie de me réveiller et je suis en retard pour la bouffe, alors, camembert.

Allez, sans plus attendre, la suite.

Jour 2 :

6h00 : Réveil. Je ne cède pas devant la barbarie : ok, les copains ont réussi à me sortir du lit, mais je reste accroché à mon traversin. PREND CA, LA BARBARIE.
6H30 : Je déjeune gaiement, nonobstant le fait que dans moins d'une heure j'aurai tout vomi.
7h00 : Cours : TIOR. Le TIOR (Techniques d'Intervention Opérationnelles Rapprochées... oui, je sais, moi aussi j'abhorre notre manie
des acronymes crétins) est comme qui dirait l'art martial de l'armée. Coups de pieds/poings/coudes/genoux, classique, mais surtout saisies, prises pour amener au sol et procéder à des palpations, un menottage, etc. C'est sympa et très utile en Vigipirate quand un imbécile de drogué/déviant/jeune-insatisfait-des-zones-périurbaines-sensibles vous emmerde (on a pas le droit de l'abattre comme un chien). ATTENTION ! Il faut pas taper à la tête, parce qu'il y a toujours un connard avec son portable prêt à filmer. Jamais le visage, toujours les burnes. Quand on a affaire à une tête de noeud, c'est plus délicat.
7h05 : ça y est, je me souviens du premier inconvénient des cours de TIOR.
7h05 et 01 secondes : début de l'échauffement pour demeurés trisomiques. Selon l'instructeur, ça sert à dévérouiller le corps. C'est FAUX, c'est de la sélection naturelle. Si tu survis à cet échauffement, tu deviens une arme, un prêtre de la mort implorant la guerre.
7h09 : Assis ! Debout ! Assis ! Sur le dos ! Sur le ventre ! Sur le dos ! On rampe vers moi on rampe vers moi allez allez allez !
7h12 : "un monde où la paix et la tolérance remplacent la cupidité et le bas-débit est-il possible ?" médité-je tout en marchant sur les fesses de mes camarades alignés au sol.
7h13 : "Mhgrmrmm" médité-je tout en me faisant marcher sur les fesses par mes camarades.
7h30 : début de la séance proprement dite, émergence du second inconvénient : on reprend tout de la base. Allons, dans le groupe certains n'en ont jamais fais, et puis, ça peut s'avérer utile, des rappels.
8h00 : PLAQUAGE AU SOL EN GARDE PLAQUAGE AU SOL EN GARDE PLAQUAGE AU SOL EN GARDE CHUTE AVANT EN GARDE CHUTE AVANT EN GARDE PLAQUAGE AU SOL.
8h02 : J'arrache le coeur noir de l'instructeur. Il le contemple, dans un dernier râle d'agonie, alors que je plonge mes incisives dans le muscle encore palpitant, hurlant des imprécations gutturales venues du tréfond des âges sombres.
8h03 : je me révei... quoi ? On vous l'a déjà faite : / ?
9h00 : Cours : Rappel. En effet, ce sont des rappels sur le rappel. Humour. L'instructeur fait partie d'un régiment de forces spéciales,
dont les personnels se reconnaissent facilement, ce qui peut paraître quelque peu contre-productif. En effet, ils ne ressemblent pas à des militaires. Le force spéciale ne porte pas son béret, il a des lunettes de soleil pour night-clubber, les cheveux trop longs, des chaussures
de randonnée achetées à Décathlon, et si toi tu mets le genre de treillis qu'il a, tu prends des jours de trou. Bien sûr, il parle ouzbeque, il peut te tuer de 27 façons différentes avec un trombone et il attire inéluctablement la petite para qui traîne sur la base avec son cul de l'espace justifiant à lui tout seul l'existence du GHB.
10h30 : fin des activités de la matinée.
10h30 et 22 secondes : attends, quoi, tu peux répéter ?
10h30 et 24 secondes : non sérieux, on est libre jusqu'à 13h00
10h31 : je comate l'air béat devant mon ordinateur.
11h52 : on me menace de me faire du bouche à bouche si je me dépêche pas d'aller me nourrir.
12h09 : d'un mouvement ferme et résolu des mes puissantes mâchoires aux maxillaires surdéveloppées, je déchiquète avant de les broyer sans merci des quartiers de chair trois fois trop grands pour un homme (mais ne suis-je qu'un homme ?). D'une giclée vive et précise des mes glandes SALIVAIRES (on va se calmer merci), j'enrobe la pulpe obtenue d'un suc aussi corrosif que mon humour afin de faciliter la descente dans un œsophage (bizarrement il ne mange pas que des œufs) dont le regard indique qu'il en a vu d'autres. Là où trois heures de digestion est la moyenne, mon estomac, véritable sanibroyeur, n'a besoin que de quelques sec.. TOP ! Ah bah oui fallait suivre. Enfin, mes 57m d'intestins s'emploient d'une frénésie sauvage à extirper le moindre nutriment de ce qui n'est plus que bouillie informe. Plus de 97% de la matière partira dans le sang, servant glorieusement à alimenter ce miracle biologique, moi. Les 3% restant, bien sûr, c'est le caca.
12h10 : j'avais bien dis que ce serait épique, bitch.

13h00 : Initiation : escalade. Trois méthodes nous sont proposées.
13h30 : après démonstration des-dites méthodes, je regrette que Rocketeer et Boba Fett n'aient pas fait plus d'émules.
13h35 : première méthode, l'échelle de spéléo. C'est très simple à faire chez soi, il suffit d'un peu de fil dentaire et de quelques cure-dents pour les barreaux.
13h40 : la montée (sur 5 pauvres mètres) se déroule sans souci. Pour la sécurité, je suis assuré par mon farceur de chef de peloton.
13h42 : descente. On lâche l'échelle et c'est l'assureur qui nous fait descendre tranquillement. Tout doucement. PépèrAAAAAAAAAAAAAAAAAAH *schtong* EURF.
13h42 et 12 secondes : je regarde mon farceur de chef de peloton... oui, c'est ça, c'est bien lui qui m'a lâché sur 2m. Et il est mort de rire. Et il enchaîne sur sa blague n°2, la fameuse "ahah je donne pas de mou à la corde et tu restes en l'air".
14h20 : deuxième méthode, trop compliquée à décrire donc voici un lien. ça demande une bonne coordination de tous les pieds et de toutes les mains. Quand c'est fluide (comme l'instructeur), on peut y trouver une certaine classe. Quand ce n'est pas fluide (moi), on ressemble à s'y méprendre aux grenouilles en classe de bio, avec des électrodes un peu partout.
14h45 : troisième méthode, comme la deuxième mais une seule jambe. J'esquive brillamment.
15h30 ou 16h00, je sais plus, c'est à cause de la paludrine : piscine ! Yeah ! Enfin un truc physique où je vais pouvoir faire le malin sans mentir ! Même principe, on plonge, on enfile nos treillis, et c'est parti pour quelques longueurs diverses et variées.
16h45 à mon avis : "ok, maintenant, dernière épreuve, 200m et je prends les chronos"
16h45 et 02 secondes : Yay, à moi la première place, c'est ma course c'est mon jour je peux le faire les yeux du tigre !
16h45 et 04 secondes : "c'est une note par groupe, j'arrête le chrono quand le dernier est arrivé"
16h45 et 06 secondes : do you really want to huuuurt me ? do you really want to make me cryyy ?
17h15 : on se r'habille. On a mis 11min48, soit 4s de moins que l'autre groupe. Sur 200m, j'en ai fais à peu près 125 en portant à deux un camarade non-nageur. Je suis donc plus ou moins complètement mort. J'ai rien contre les non-nageurs, mais bon, c'est pas comme si la piscine
faisait partie de nos épreuves annuelles notées, hein ? ça pourrait être pas mal d'avoir plus de séances, hein ? Damned.
17h20 : Cours sanitaire. Je crois que l'infirmier nous parle de brancards, mais je m'en tamponne le râble avec une pelle à neige. A 35 mètres, y'a la petite para qui fait des étirements, alors il pourrait nous parler de son viol par un ours quand il était mioche ou de l'évolution du cours de l'or en Babylonie sous Nabuchodonosor 2 (qui a donné son nom au Nabuchodonosaure, un dinosaure qui aimait beaucoup les jardins), ça ferait pas bouger l'aiguille de mon intéressomètre d'un iota.
18h00 : FIN DE LA JOURNEE, WOOOUHOUUUUUU !

Bien sûr, c'était la journée "tranquille", ce qui cachait quelque chose. Les ordres pour le lendemain, ce fameux mercredi où ma chair m'abandonna, confirmèrent mes soupçons : on allait ramasser.
Mais ceci est une autre histoire. Dès que tout le monde sera reviendu (et donc que j'aurai accès à un appareil photo), vous saurez tout.
Patience.

dimanche 1 mars 2009

Fluctuat nec mergitur mais c'était pas loin

Salut, populace.
Grâce, d'une part, à une constitution bien plus robuste que celle de la défunte IVè, et d'autre part, à un savant cocktail de produits pharmaceutiques dont seule une minorité sortait directement de la Zone 51, j'ai pu récupérer l'usage de mon épaule. Oh, bien sûr, je ne re-dépasse pas encore les 60 pompes sur un bras mais... oh après tout tu t'en fous, la dernière fois que t'as entendu parler de "pompes" c'était dans un épisode des Shadocs.

Et donc, maintenant qu'environ 97,3% de mes chers camarades sont partis à Toubacouta faire les zouaves dans la mangrove (et faire le zouave au Sénégal, c'est le comble), j'ai tout le temps nécessaire pour, erm... rien branler.

Non je déconne, je vais vous raconter les deux jours et demi de stage pré-humiliation épaulière. Comme je n'ai aucun amour-propre et que le ridicule ne tue pas, on va vite transformer ça en truc épique et c'est cette version qui restera gravée dans les culs. Les annales. Whatever.

Jour 1 :

6h45 : L'escadron est présenté aux instructeurs, qui sans surprise sont tous des cyborgs.
6h46 : ça y est, j'en ai déjà marre.
6h46 et 27 secondes : je pense au char Leclerc qui me manque déjà.
6H46 et 27 secondes 72 centièmes : et forcément j'ai une érection.
7h00 : départ de la marche-course de groupe. Pour les ignorants, il s'agit de courir 8km en treillis rangers sans vomir quand on passe juste en face du port de pêche.
7h48 : arrivée. Les copains ont du me porter, j'avais pas assez de sang disponible dans les jambes.
8h25 : fin des tests d'entrée, après quelques pompes/abdos/tractions/montée de corde avec laquelle j'eusse aimé pendre l'instructeur qui arbore une brosse d'environ 12cm sur le crâne. Il serait noir, ce serait lui, le Prince de Bel-Air. On perçoit baudrier, corde, mousquetons.
9h00 : ah ben non, pas fin des tests, j'avais oublié la piscine. Emploi de la vieille technique commando du "je saute dans l'eau ET j'enfile mon treillis" dont l'utilité m'échappe sur le coup, mais qui suis-je pour juger. Grâce à ma quille, mon aisance naturelle dans la flotte est comme dodécuplée (multipliée par 12, quoi...).
10h00 : Cours : "comment se rétablir sur une tyrolienne quand on a basculé comme la grosse merde que notre prof de maths en cinquième a toujours prévu qu'on deviendrait, CONNASSE".
Nous apprenons avec stupeur que la Tyrolie n'est pas une contrée mythologique grecque.
10h12 : mon érection retombe comme les soufflets que tu fais à ton mari (et après tu te demandes pourquoi il te bat).
10h30 : Cours : "j'apprends à faire des noeuds pour ne pas mourir sur la piste d'audace". Cabestan, demi-cabestan, 43% de cabestan, noeud de huit, de neuf, de Pi (à pas confondre
avec la queue du même nom), noeud français (le célèbre noeud Rhône), tout quoi tu veux.
12h00 : je me souviens que j'ai signé avec une fourchette. Le repas est un moment privilégié pour cultiver la cohésion du peloton. On partage nos impressions de la mâtinée, on suppute les choses à venir, on espère secrètement qu'une fièvre hémorragique lambda va emporter les instructeurs avant qu'on ait terminé nos plats, etc.

13h00 : et voilà, je le savais, jamais là quand on en a besoin, l'ébola.
13h01 : Cours : le zodiac. Je découvre avec un enthousiasme feint que le zodiac est manufacturé chez Ikea.
14h00 : Mais que diable allait-il faire dans cette galère ? Me demandé-je tout en empoignant une rame.
14h04 : CA ALORS ! Pagayer à 6 face au vent avec une houle d'1m est *difficile* ! Décidément, j'en aurai appris, aujourd'hui.
14h16 : MAIS PUTAIN DE TA MERE, A L'HEURE DU PORTE-AVION NUCLEAIRE, QU'EST-CE QUE JE FOUS AVEC UNE PLANCHE DANS LES DOIGTS !
14h17 : Les instructeurs hilares nous tournent autour avec leur bordel à moteur.
14h17 et 71 secondes : d'un tir précis j'abat leur chef d'une balle en plein front.
14h18 : je me réveille.
15h00 : enfin revenu sur la berge, je scrute longuement la mer, espèrant mais en vain que le courant de l'onde pure me ramène mes bras, j'en ai besoin pour la suite.
15h30 : Piste d'Audace. Non, là, vraiment, ça mérite son propre article, la piste d'audace, accompagnée des photos qui vont bien. Ce sera pour la prochaine fois.
18h00 : je me souviens que j'ai signé avec une fourchette. Le repas est un moment privilégié pour végéter la tête dans son assiette en se demandant pourquoi il y a autant d'heures dans une même journée et y'aurait pas moyen d'avoir une dérogation, des fois ?

19h30 : triple déconvenue. 1) C'est niet pour la dérogation. 2) l'ébola refuse toujours de coopérer. 3) on retourne pagayer. Et ce soir on se la joue, famas d'instruction (avec la culasse soudée. T'es bien avancé hein ?), radio, Jumelles à Vision Nocturne sur le front, ça va poutrer le poney.
19h31 : tout sourire, mon chef de peloton m'annonce que je suis son radio. C'est à moi que revient l'honneur insigne de porter cette sympathique pièce d'équipement qui a sans nul doute connu la mer Morte quand elle était malade. Taillée dans une enclume, touches en corne de brebis, ergonomie qui fit la fierté des ingénieurs du Crétacé, et bien sûr son inoubliable batterie de 112 kgs au charbon entièrement rechargeable à la main.
19h31 et 02 secondes : "non mon lieutenant, je pleure pas, je transpire des yeux".
20h00 : après une pseudo mise en ambiance tactique, on reprend la mer. Le vent n'a pas baissé mais la houle est réduite de moitié. Mes bras aussi.
20h20 : l'écouteur du poste refuse obstinément de rester à la bretelle et préfère traîner au fond du zodiac. M'en fous, de toute façon personne répond à mes contrôles radios.
21h03 : je décide de sauter à l'eau et de rejoindre Narbonne-Plage, Aude (11) à la nage.
21h04 : je retiens mon geste à la dernière seconde : et mon ordi ?
21h48 : fin de l'exercice. Au lit !
22h00 : raté, comme Wolfgang, c'est pas au lit. Cours : explosifs. Chaîne pyrotechnique simple et composée. La seule chose que j'apprend, c'est que l'instructeur fit partie
du 8ème RPIMA. Comme le sergent V. pendant mon CME. Comme mon entraîneur au foot quand j'étais en 3ème (le premier qui fait une réflexion, il passe pas la nuit). Je suis poursuivi par tous les fous furieux de ce régiment. Avec la fatigue, je me demande si ce n'est pas un signe, et puis je me souviens à quel point je trouve ça risible de sauter d'un avion en parfait état de marche.
00h22 : j'arrête la douche, je commence à voir passer des carpes entre les gouttes.
00h25 : comme souvent, la fatigue empêche de s'endormir de suite. Je compte mes bleus, et en moins de temps qu'il n'en faut pour dire "AU SECOURS RAMENEZ-MOI EN FRANCE", cette
salope de Morphée me fait du gringe.

La suite au prochain coup : D !